Comment se porte le marché de la ventilation ?
P.H. : Ce marché change dans son approche, notamment parce qu’on parle de plus en plus de qualité de l’air intérieur. En termes de marché, la construction neuve est très ralentie, mais le marché du tertiaire et de la rénovation se porte bien, avec des programmes ambitieux dans le diffus, les logements collectifs et les bâtiments tertiaires.
Y.E. : Le décret tertiaire et la RE 2020 poussent le marché tertiaire vers la double flux, qui diminue beaucoup la consommation de chauffage. Cela transforme effectivement le marché.
Parlons des professionnels. Qui pose la ventilation aujourd’hui sur les chantiers ? La profession de ventiliste s’impose-t-elle ?
P.H. : Le métier de ventiliste existe depuis des décennies, ceux qu’on appelle les « gaineux » sur les chantiers, très spécialisés dans la ventilation. Ils se développent en ce moment. Dans le diffus, il y avait parfois l’électricien, parfois le plombier-chauffagiste, parfois même le plaquiste en pavillonnaire neuf… La question n’est pas celle du métier premier, mais la qualité de l’installation. C’est ce que nous défendons à l’Association française de la ventilation !
Y.E. : Dans les grandes entreprises de génie climatique, on observe de plus en plus d’équipes spécialisées, qui travaillent dans les règles de l’art.
Dans les cahiers des charges, la ventilation fait-elle toujours partie du lot CVC ?
Y.E. : De plus en plus de bureaux d’études et de maîtres d’ouvrage séparent la ventilation du lot CVC. C’est lié au fait que les montants en jeu sont plus importants, avec de la récupération, du chauffage et du rafraîchissement par la CTA… Cela permet de couper des lots, mais il faut pour cela que des installateurs spécifiques puissent répondre à ces lots.
P.H. : Trop souvent, ce lot ventilation était le mal-aimé du bâtiment. L’apparition d’un vrai lot à part entière va nous permettre de monter en qualité, et de redonner ses lettres de noblesse à la ventilation ! Confort et santé sont de vrais enjeux.
La qualité de l’air intérieur nécessite aussi que les installateurs montent en compétence, de même que le confort d’été. Ces arguments font-ils évoluer le marché ?
P.H. : Le focus élargi sur la ventilation nous permet de jouer sur toutes les possibilités. L’AFV et les organisations professionnelles travaillent à la montée en compétence, via notamment le CQP pour les salariés des entreprises amenés à concevoir, installer et maintenir les systèmes de ventilation.
Y.E. : Le confort d’été est un des piliers de la RE 2020, ce qui oblige les fabricants à agir pour ventiler et rafraîchir. Côté QAI, les décrets nous obligent, pour l’instant sur les locaux d’enseignement, à respecter les seuils pour préserver la santé.
Au-delà de l’obligation, les maîtres d’ouvrage se montrent-ils volontaires sur le sujet de la QAI ?
Y.E. : Oui tout à fait. Avoir poussé ce sujet avec le décret amène une demande de la part d’autres maîtres d’ouvrage. Dans les bureaux, les employeurs sont désormais soucieux de la qualité de l’air intérieur.
La RE 2020 introduit un test pour les installations de ventilation. Est-ce pour vous une bonne chose ?
P.H. : Oui, et nous avons d’ailleurs participé aux travaux pour instaurer ce contrôle. Pour redonner ses lettres de noblesse à la ventilation dans le bâtiment, ça ne peut passer que par la qualité. Nous travaillons pour mettre en œuvre ces contrôles dans la rénovation, c’est l’étape suivante !
Y.E. : Les fabricants sont passés, du fait de ce test, sur des systèmes à joints. Les installateurs ont changé leurs habitudes pour s’y habituer. Ils ont globalement absorbé la petite hausse de prix et ont adapté leurs compétences pour monter en compétences.
Il n’existe pas de formation initiale de ventilation, le regrettez-vous ou faut-il conserver une formation globale au CVC ?
P.H. : Nous travaillons sur ce sujet depuis quatre ans. Nous arrivons dans la période de révision des diplômes, et nous en profitons pour proposer une année complémentaire au CAP, spécifique à la ventilation. Conception, réalisation, mise en service, maintenance, QAI… : nous avons posé les fonts baptismaux de cette année à venir. Ce dispositif existe déjà autour de la maintenance de la PAC.
Y.E. : Avoir des notions en thermodynamique et en hydraulique est indispensable, avant de se concentrer sur la ventilation, et se mettre à niveau sur toutes les normes et les techniques qui arrivent.
Qualification et formation continue sont elles aussi importantes. Où en est-on ?
P.H. : Tant que nous n’avions pas suffisamment de plateformes avec du matériel de ventilation, il était difficile de former les salariés. Nous avons désormais un maillage de plateformes techniques, via des centres traditionnels mais aussi via les industriels, pour déployer le CQP. Maximilien-Perret en Ile-de-France, Amiens… : le maillage se renforce dans toutes les régions et des sessions se mettent en place.
Y.E. : Je donne moi-même encore beaucoup de cours. Les professionnels de l’enseignement n’ont hélas pas encore toutes les compétences, mais de plus en plus de centres s’équipent de CTA double flux, d’extracteurs avec des moteurs EC, des équipements à la page pour faire monter en compétence leurs élèves.
Quel est le besoin principal des installateurs aujourd’hui ?
Y.E. : La demande prioritaire, c’est l’information. La tête dans le guidon, ils n’ont pas forcément le temps d’aller chercher l’information. Nous les accompagnons et nous les aidons pour toutes les typologies de projets. Notre site Internet rassemble les réglementations pour les rendre indépendants.
P.H. : Nos organisations professionnelles font là-dessus un travail important. L’UMGCCP compte par exemple douze collaborateurs qui co-rédigent les normes, les diffusent, les décortiquent. Des informations par l’organisation professionnelle et par le partenaire industriel sont indispensables pour monter en compétence !