On le sait déjà, la RE2020 n'entrera en vigueur qu'à l'été 2021. Le gouvernement veut se laisser le temps de faire les choses correctement, et aussi rattraper le retard dû à la crise sanitaire que nous vivons. Lors d'une conférence de presse donnée ce mardi 24 novembre, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et la ministre chargée du Logement, Emmanuelle Wargon, ont détaillé les principales orientations retenues pour cette future réglementation.
Comme annoncé, la réglementation sera donc progressivement " de plus en plus exigeante, depuis son entrée en vigueur en 2021, jusqu’à 2030 avec trois jalons prévus en 2024, 2027 et 2030 qui constituent autant de marches de rehaussement des exigences " selon le ministère de la Transition écologique. La première échéance d’entrée en vigueur concernera les logements ainsi que les bureaux et l’enseignement. Les bâtiments tertiaires plus spécifiques feront l’objet d’un volet ultérieur de la réglementation.
En parallèle, un label d’État, qui sera créé dans la foulée de la RE2020, et consolidé dès le deuxième semestre de 2021, " permettra à ceux qui le souhaitent, maîtres d’ouvrage publics ou privés, d’anticiper les futures exigences de la RE2020, de montrer l’exemple et de préfigurer les bâtiments d’après-demain."
Le Bbio abaissé de 30 %
Pour exiger plus de sobriété, la RE2020 va renforcer l’exigence portant sur le besoin bioclimatique, ou Bbio. Par rapport aux exigences de la RT2012, le seuil maximal pour le besoin bioclimatique des logements sera abaissé de 30 %. " Il s’agit d’une exigence ambitieuse mais réaliste, car déjà aujourd’hui une partie significative des maisons, et même des logements collectifs, satisfont ces critères de performance énergétique " estime le ministère de la Transition écologique, ajoutant " la facture d’électricité d’une maison neuve typique avec une pompe à chaleur sera de l’ordre de 200 €/an, soit moins de 17 €/mois. "
Le gaz chassé des logements neufs
Le gouvernement ne cache donc pas son amour pour la thermodynamique. Autre preuve, s'il en fallait, la RE2020 a pour objectif la disparition progressive des logements neufs chauffés au gaz. Le ministère de la Transition écologique annonce d'ailleurs une sortie des énergies fossiles pour 2024.
En maison individuelle, " où les solutions non fossiles sont très courantes et parfaitement maîtrisées, notamment la pompe à chaleur ou le chauffage biomasse ", le seuil sera fixé à 4 kgCO2/m2/an dès l’entrée en vigueur de la RE2020 et " exclura de fait des systèmes utilisant exclusivement du gaz. précise le bureau de Barbara Pompili, ajoutant, alors qu’une maison moyenne existante chauffée au gaz émet près de 5 tonnes de CO2/an, la même maison aux normes RE2020 émettra moins de 0,5 tonne, soit 10 fois moins ! Si l’on prend un équivalent en kilomètres parcourus en voiture, c’est 40 000 km dans un cas, moins de 4 000 km dans l’autre. "
En logement collectif, la transition sera progressive entre 2021 et 2024, " car aujourd’hui encore 75 % des logements collectifs nouvellement construits sont chauffés au gaz " justifie le ministère. " Les alternatives (réseau de chaleur, chaufferie biomasse, pompe à chaleur collective, solaire thermique) sont nombreuses, mais doivent encore se développer à grande échelle et la filière doit s’approprier les conceptions qui accompagnent ce changement. " Le seuil sera d’abord fixé à 14 kgCO2/an/m2, laissant ainsi encore la possibilité d’installer du chauffage au gaz à condition que les logements soient très performants énergétiquement. Ensuite, dès 2024, le seuil sera ramené à 6 kgCO2/m2/an, excluant de fait le chauffage exclusivement au gaz, mais permettant le développement de solutions innovantes, y compris hybrides (telles des pompes à chaleur utilisant un léger appoint de gaz en cas de grand froid).
Le recours à la chaleur renouvelable systématique
La RE2020 systématisera également le recours à la chaleur renouvelable, via un seuil maximal de consommation d’énergie primaire non renouvelable. Le gouvernement souhaite " empêcher un retour massif du radiateur électrique (convecteur à effet Joule), car s’il est peu coûteux à installer, ce mode de chauffage est cher à l’usage et pèse plus fortement sur le réseau électrique au plus fort de l’hiver (pointe hivernale). " Pour l'instant, le ministère n'a pas communiqué ce seuil maximal.
Le besoin de froid intégré au calcul
Parce que nous risquons de vivre encore de nouveaux épisodes caniculaires, la RE2020 va également intégrer le besoin de froid dans le calcul du besoin énergétique du bâtiment (Bbio). Sur la base d’un scénario météo similaire à la canicule de 2003, un indicateur de confort d’été sera calculé lors de la conception du bâtiment, qui s’exprimera en degré.heure (DH).
La RE2020 fixera un seuil haut maximal de 1250 DH qu’il sera interdit de dépasser, " ce qui correspondrait à une période de 25 jours durant laquelle le logement serait continument à 30 °C le jour et 28 °C la nuit " précise le ministère. Ce seuil sera le même partout en France. Comme il sera plus difficile à respecter dans le sud de la France (pourtour méditerranéen et arrière-pays provençal), pour les logements construits dans ces zones climatiques chaudes, il sera possible de déroger à certaines exigences constructives, notamment celles qui nécessiteraient un recours trop important à des matériaux biosourcés. Reste à voir les décrets autorisant cette dérogation.
Parallèlement, la RE2020 fixera un seuil bas à 350 DH, à partir duquel des pénalités s’appliqueront dans le calcul de la performance énergétique. " Ces pénalités seront forfaitaires afin d’inciter tous les bâtiments à faire des efforts de conception permettant de réduire le nombre d’heures au-dessus du seuil. "
Le gouvernement précise que les solutions de climatisation dites passives seront encouragées par la réglementation à travers son moteur de calcul, " qu’il s’agisse par exemple de la forme du bâtiment, de son orientation, de protection contre le soleil, de l’installation de brasseurs d’air ou encore de puits climatiques. "
Un indicateur et une exigence nouveaux pour une réglementation thermique. Le ministère se donne donc le droit à l'erreur, et au réajustement. " La réalité exacte du niveau de confort d’usage qu’ils traduisent reste à évaluer finement, précise l'administration. Aussi, en fonction des retours d’expérience à l’issue des premières années de réglementation, cette exigence pourra être renforcée. "