À Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), l'école maternelle des Boutours, constituée de neuf classes, a été équipée d'une très innovante ventilation naturelle à double flux. Si le rendement de la récupération de chaleur (50% environ) est inférieur à celui des VMC de même type, l'absence de moteur électrique rend le système plus simple à exploiter sans dégrader pour autant la qualité de l'air intérieur.
S'il est un détail architectural qui frappe d'emblée le visiteur de la nouvelle école maternelle des Boutours, à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), ce sont bien ses cinq tours de ventilation culminant à 11 mètres au-dessus du sol. Une hauteur justifiée par le choix du tirage naturel. « Notre direction de la recherche et de l’innovation territoriale souhaitait mettre en place un système simple à utiliser/entretenir par le personnel et non sujet aux pannes électriques : un système sans aucun moteur si possible. C'est pour le développer, avec l'aide du bureau d'études Tribu, que j'ai été embauché », explique Mathieu Lebourhis, ingénieur énergéticien à la Ville de Rosny-sous-Bois.
Du point de vue de la réglementation thermique, rien ne s'opposait à ce choix de la ventilation naturelle puisqu'il suffisait de faire en sorte que 30% des surfaces de baies en façades puissent être ouvertes (ce qui a bien entendu été prévu). Mais avec ses cinq tours - une pour trois ou quatre salles selon les cas -, le projet va beaucoup plus loin, notamment sur le plan de l'efficacité énergétique. L'été, grâce aux ouvertures sur les façades, le tirage naturel profite de toute la hauteur entre ces ouvertures et l'extrémité des tours de ventilation, soit une dizaine de mètres. En hiver, l’air neuf rentre à la base des tours, via des prises spécialement aménagées à cinq mètres de hauteur, tandis que l'air vicié ressort par les exutoires, six mètres plus haut, grâce à la force du vent et aux gradients thermiques. Surtout, cet air neuf est réchauffé par l'air vicié lorsque les deux se rencontrent - sans se mêler - au sein des échangeurs à plaques Klingenburg installés au-dessus de chaque salle ventilée de l'école.
Aucun ventilateur
Un système double-flux donc, sauf que cela n'avait jamais été mis en œuvre à cette échelle et sans moteur de ventilation. « Il a fallu concevoir un schéma aéraulique spécifique qui rende le croisement des flux possibles en tenant compte du fait que la présence de l'échangeur allait freiner l'air et qu'aucun système mécanique ne viendrait compenser cette perte de charge », détaille Mathieu Lebourhis. Résultat : 50% de récupération de chaleur au lieu de 85% ou 90% dans le cas d'une VMC double-flux ordinaire. Sans doute aurait-il été possible d'aller au-delà, mais en impactant défavorablement le renouvellement d'air, qui était en l'occurrence dimensionné à 750 m3/heure.
« En ventilation naturelle, les débits ne sont pas assurés puisqu'ils sont variables, précise l'ingénieur. C'est pour cette raison que nous parlons de dimensionnement, en nous appuyant sur une simulation thermique dynamique (STD). » Cette simulation permet de vérifier la valeur de 750 m3/heure, mais aussi le caractère très évolutif de cette donnée, qui peut à certains moments descendre sensiblement sous l'objectif initial. « Par conséquent, pour garantir la qualité de l'air intérieur, c'est le niveau de CO2 qui fait foi dans l'école, grâce à une surveillance permanente de cette grandeur et à un affichage par indicateur Led dans chaque classe. »
Pendant les périodes d'occupation des locaux, l'analyse des mesures effectuées sur l'année écoulée fait état de taux de CO2 souvent inférieurs à 1000 ppm, avec des pointes à 1500 ou 1600 ppm et une valeur moyenne autour de 1250 ppm, comme l'avaient d'ailleurs prévu les simulations. « Nous sommes dans des classes de concentration de CO2 considérées comme bonnes : elle correspondent généralement au degré 2 sur 5 de l'indice Icone créé par le Cstb. En résumé, nous faisons aussi bien qu’avec la plupart des ventilations mécaniques ! », se félicite Mathieu Lebourhis.
L'ingénieur mentionne tout de même une petite frustration au sujet du dispositif de commande. En effet, contrairement à l'ambition de départ qui était d'éviter tout moteur électrique dans l'installation, il n'a pas été possible de trouver « dans les temps » une entreprise qui puisse fournir un système d'actionnement manuel des registres de ventilation utilisable facilement par les enseignants. « Ce dispositif, nous l'avons trouvé depuis et nous l'utiliserons pour la ventilation naturelle d'autres projets en cours, à commencer par un centre de loisirs dont la construction va démarrer. Mais l'école fait finalement appel à un asservissement classique, c'est-à-dire à une commande électrique des registres et une logique de programmation basée sur le taux de CO2. »
Complexité des gaines en coffrets
Le centre de loisirs évoqué par Mathieu Lebourhis profitera également de l'expérience acquise aux Boutours dans le domaine de la sécurité incendie : « Dans l'école maternelle, où nous avons installé les échangeurs de chaleur au niveau des circulations, le critère coupe-feu de 30 minutes entre ces circulations et les classes a été obtenu en plaçant les gaines en coffrets, ce qui s'est révélé complexe à réaliser en raison du peu d'espace disponible. Pour le centre de loisirs, nous nous affranchirons de cette difficulté en positionnant les échangeurs au-dessus des salles de façon à ce que le réseau aéraulique ne traverse pas les circulations. »
Fiche technique
Localisation : Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis)
Équipements : Échangeurs à plaques Klingenburg
Poste couvert : ventilation naturelle avec récupération de chaleur
Acteurs
Maître d'ouvrage : Ville de Rosny-sous-Bois
AMO : Tribu
Architectes : Emmanuel Pezres et Fanny Mathieu
Ingénieur énergéticien : Mathieu Lebourhis
Entreprise (chauffage, ventilation, plomberie) : Bosio et fils (Montfermeil, 93)